Au sujet de Simone Weil, il me semble que la tentation
est fréquente de lui attribuer une "métaphysique chrétienne". Laquelle?
celle de Thomas d'Aquin, qui renvoie à Aristote ? Celle d'Augustin, qui
renvoie davantage encore à Cicéron qu'à Plotin ? Celle de Newmann ? de
Blondel ? d'Unamuno ? de Zubiri ? La métaphysique de Simone Weil est
d'abord largement platonicienne ou néoplatonicienne, et nombre de ses
représentations doivent beaucoup plus à Plotin ou Proclus, semble-t-il, qu'à Paul de Tarse ou même à Clément d'Alexandrie.
Qu'ensuite Simone Weil
soit sensible au drame christique, au point que cette figure lui
apparaisse comme un paradygme de l'homme accablé par les souffrances que
lui inflige l'homme, cela n'est pas douteux. Elle a d'ailleurs ce point
en commun avec Albert Camus, bien que les deux penseurs s'y
réfèrent différemment. Mais il faut remarquer que c'est un thème
littéraire qui traverse largement l'époque (Bernanos, Greene, Pérez
Galdos...)
Et il faut remarquer surtout que ni Weil ni Camus ne font
descendre les exigences de la vie morale d'un ciel des valeurs - ce qui
est particulièrement remarquable à propos du catalogue des besoins de
l'homme qu'esquisse L'enracinement... dont Homère est l'une des
sources les plus explicites d'inspiration. Quelle que soit la proximité
avec l'évangile où se sent personnellement Simone Weil, à aucun moment
elle ne va puiser directement dans la Bible ou d'autres ouvrages juifs
ou chrétiens aucun des éléments de sa construction philosophique.
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