mardi 2 décembre 2014

Alain Badiou, considérations intempestives sur la promesse

A entendre Alain Badiou, il y aurait une actualité de la promesse. En matière de promesse, il conviendrait en effet selon lui d'envisager en cette matière non seulement la qualité, mais encore la quantité, jusqu'à se demander : trop de promesses, ou pas assez ?

Ces considérations intempestives d'Alain Badiou sur la promesse sont formulées dans le programme qu'il décline en vue de son intervention au le Forum Le Monde - Le Mans, du 14 novembre 2014, qui a pour thème, précisément, la promesse. Sous le titre annoncé Le double crépuscule des promesses, il écrit :

Dans l’ordre de l’amour, la promesse d’éternité (« Je t’aimerai toujours ») est en voie de disparition, quand grandit la conviction que je ne dois pas sacrifier à un autre, toujours pour part inconnu, la liberté et l’intérêt narcissique qu’enveloppe dans notre monde la souveraineté de l’individu. La promesse agonise par inflation des intérêts du Moi. Dans l’ordre de la politique, la promesse programmatique (« Mon parti et moi répondrons à toutes vos demandes ») est tout aussi malade, mais c’est cette fois par inflation de la vacuité : si peu de promesses électorales sont tenues, que la promesse elle-même semble n’être qu’un exercice rhétorique. Je soutiendrai qu’il convient de réhabiliter la promesse dans l’ordre de l’amour, et qu’il est nécessaire d’apprendre à s’en passer entièrement dans l’ordre de la politique.

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Effectivement, pourrait-on objecter à cette proposition d'Alain Badiou, on assiste en politique, dans nos pays démocratiques, à une inflation de la promesse qui dévalorise gravement le discours politique. Il conviendrait donc d'y remédier, en donnant sans doute une moindre place aux campagnes des candidats, décidément envahissantes.

Néanmoins, il suffit de tourner les yeux vers certains partis dont le candidat unique à la présidence obtient 100% des voix de ses électeurs, ou vers tel pays où le président et le premier ministre échangent avec une grande constance leurs charges, pour se rendre compte que ce n'est pas la promesse qui envahit alors le régime de la parole, mais les contre-vérités, la menace voire les voies de fait.

Reste que ce rééquilibrage des sphères publique et privée au regard de la promesse, suggéré par Alain Badiou fait sens, et que quelque objection qu'on puisse formuler à son égard, il jette sur le monde actuel une lumière bienvenue. 
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Lire le programme du Forum philo Le Monde - Le mans 2014 : Lien
Lire l'entretien avec Alain Badiou, à ce sujet, de Mediapart : Lien

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