vendredi 28 novembre 2014

Promesse ou contrat ?


A la différence de la civilisation grecque, la civilisation romaine développe une expertise juridique, où la promesse est considérée sous un angle particulier, celui de la contractualisation.

La distance de la promesse au contrat peut échapper à l'attention, mais ses conséquences ne sont pas sans importance.

La promesse


La promesse proprement dite s'opère de personne à personne, et prend tout son sens dans le secret de la relation je-tu. La relation n'est pas forcément égalitaire, et par la promesse  le promettant peut s'obliger envers quiconque, le fort envers le faible, par exemple. La promesse vue sous cet angle n'a pour témoins que le promettant et celui auquel s'adresse la promesse. Et la teneur de cette promesse n'a pour garantie que la mémoire et la bonne foi des deux parties - la fidélité et la confiance -, et c'est dans ce sens que la promesse peut avoir une portée "métaphysique" pour Gabriel Marcel, ou constituante du sujet chez Paul Ricœur... En guise de sanction, la promesse n'a donc que la confiance renouvelée ou perdue - et, à moins qu'un manquement à la parole donnée (la promesse prend tout son sens dans l'oralité) ne porte à la vengeance, la reconnaissance.

Le contrat


Anne Amiel témoigne du glissement contemporain, qui aboutit à lire principalement la promesse dans la dépendance du contrat. Dans son article "Promesse" du Dictionnaire Larousse de philosophie, Anne Amiel part en effet de Thomas Hobbes pour cerner, dans l'univers du contrat, le statut spécifique de la promesse. Elle écrit :
Le contrat est un transfert mutuel de droits qui présuppose le concours de deux volontés, c'est-à-dire enveloppe l'acceptation de celui qui reçoit.
Mais le contrat étant ainsi un acte négocié, pesé et rédigé pour être finalement acté, on distingue dans l'intention de passer contrat une promesse motrice. Anne Amiel poursuit :
Promettre est un acte volontaire, la fin d'une délibération, et porte donc sur un acte futur et jugé possible, on engage sa liberté, et "là où la liberté cesse, l'obligation commence".
On est ainsi très vite dans la promesse de contrat, notion éminemment juridique reflet d'une société du donnant, donnant. Dans cette perspective, il n'est plus possible d'évoquer que comme un souvenir le mystère sur lequel méditait Gabriel Marcel.
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  • La promesse de contrat en droit français, un article de Wikipedia : Lien
  • Théorie de la promesse unilatérale de vente en droit notarial français : Lien
  • Un aperçu de la jurisprudence récente et de ses fluctuations en matière de promesse de contrat : Lien
  • Anne Amiel explorant avec Raphaël Enthoven le thème du mensonge (et notamment du mensonge politique), une video d'Arte : Lien
  • Grand dictionnaire de la philosophie, présentation : Lien

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