mercredi 4 juin 2014

'Levinas lecteur de Derrida', par Stéphane Mosès.

Cités 2006/1 


@ Geneviève
Dans la revue Cités, "Levinas lecteur de Derrida", par Stéphane Mosès. Lien

Article riche et éclairant ! Un extrait, pour donner envie d'aller y voir :
"Il y a chez Levinas [dans Noms propres] comme un saisissement devant la radicalité de la révolution introduite par Derrida dans la philosophie occidentale. C’est sans doute pourquoi son texte se termine par une mise en lumière de ce que lui-même et Derrida peuvent avoir en commun : à savoir deux manières différentes de remettre en question la tradition de l’ontologie occidentale. Il y aurait là, de la part de Levinas, comme une façon tardive d’assumer la critique par Derrida, dans « Violence et métaphysique », de la contradiction performative qui déséquilibrerait Totalité et infini. Oui, semble dire Levinas, je continue à parler le langage de l’ontologie au moment même où je la récuse radicalement, de même que Derrida, lui aussi, continue à parler le langage de la présence au moment même où il la déconstruit irrémédiablement. Comme si cette inconséquence (ou plutôt cette oscillation permanente, que Levinas dénommera plus tard clignotement) était le prix inévitable à payer pour pouvoir dire la sortie hors du discours de l’ontologie."
Faut-il souligner combien l'interprétation proposée par Frédéric Worms est ici confortée ?

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Une autre étude sur la conversation développée par Levinas et Derrida, par Paola Marrati-Guénoun : "DERRIDA ET LEVINAS : ETHIQUE, ECRITURE, HISTORICITE"

Lien

L'analyse de Paola Marrati-Guénoun peut paraître plus confuse que celle de Stéphane Mosès. En revanche, elle est riche d'une foule de considérations qu'on aurait tort de dédaigner. Par exemple :
"...Pour Derrida la notion de trace renvoie à la question de l'écriture, question qui n'est pas étrangère à celle du corps, mais qui en propose un autre paradigme, très différent de celui, lévinassien, de la sensibilité comme exposition. En effet, à partir de l'Introduction à L'origine de la géométrie de E. Husserl, ce qui intéresse Derrida est le rapport du corps et de l'âme dans l'écriture. En analysant les raisons qui conduisent Husserl, de manière apparemment inattendue, à introduire le langage et l'écriture comme conditions de possibilité de la constitution de l'idéalité même du sens, Derrida suit le fil de la nécessité et des limites d'une certaine « incarnation » de la spiritualité du sens dans la corporéité du signe à l'intérieur de la phénoménologie husserlienne. "
Et d'autres. Et puis... enfin une voix féminine dans ce débat, qui en compte peu !

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  • @ Geneviève, dans la revue Rue Descartes, "Salut à Jacques Derrida", par Alain David : Lien
  • Voir encore : "Penser l'époque avec Levinas et Derrida", de Alain David : Lien
  • Du même auteur, Racisme et antisémitisme. - Essai de philosophie sur l'envers des concepts, de Alain David, préfacé par Jacques Derrida. Notice de la librairie Decitre : 
"Combattre le racisme, l'antisémitisme, " sous toutes ses formes ", dit-on. Cet essai, de philosophie, a pour objet d'insister, d'infléchir et de radicaliser la lutte, en débusquant partout le racisme et l'antisémitisme : partout, c'est-à-dire bien au-delà des formes dans lesquelles l'un et l'autre se révèlent, s'avouent ou se nient, bien plus loin que n'importe quelle forme ; mettant au contraire en exergue, en tant que l'énigmatique relation de ces deux mots, la terrible violence qui procède, pour toute civilisation, de l'imposition, de la superstition, de la forme. Au regard de quoi Jacques Derrida, en lecteur et préfacier chaleureux, appose ce commentaire :
" Qu'on lise donc Alain David, c'est au fond tout ce que je voudrais donner ici à entendre. Je suppose qu'alors on en conviendra : il s'agit enfin de penser [...] et de penser en pensant d'abord près de l'ombilic de la pensée même, le racisme, l'antisémitisme, le racisme et l'antisémitisme [...] C'est toute l'histoire de la philosophie, toute l'histoire des sciences sociales, toutes les approches " modernes " (théoriques et pratiques, discursives, militantes ou institutionnelles, " associatives ") du racisme et de l'antiracisme, de l'antisémitisme et du judaïsme - qu'elles soient d'ailleurs animées des pires ou des meilleures intentions, le meilleur se laissant ici ou là, dans cette terrible histoire, ventriloquer par le pire. Ambition à ma connaissance sans précédent... "

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